Regards croisés : deux artistes en résidence sur Tara

Lorraine Féline, vidéaste, et Carly Steinbrunn, photographe, sont les deux artistes en résidence sur Tara depuis Cala Gonone, en Sardaigne. À quelques heures de leur départ, c’est le temps du bilan après trois semaines passées à bord de la goélette.


Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Lorraine Féline : Je suis artiste, je vis et travaille à Paris. En parallèle à ma formation artistique, j’ai une formation en danse classique et contemporaine. Cet intérêt pour la danse m’amène à réaliser des films, des dessins et des performances autour de la notion de geste, de mouvement, et de chorégraphie. Mon dernier film, « Le ballet mécanique » 2013, tourné dans une usine Londonnienne qui fabrique des chaussons de danse, a été en compétition internationale au Festival Filmer le Travail de Poitiers en 2014.

Carly Steinbrunn : Je suis photographe, je travaille à Londres et à Paris. J’ai d’abord suivi une formation en photographie scientifique, puis j’ai étudié à l’école nationale supérieure de la photographie d’Arles. Mon travail s’attache à l’idée de découverte et de nouveauté en photographie. J’ai réalisé une série, « The Voyage of Discovery », qui a été exposée au festival photographique de la ville de Levallois. Cette série prend aussi la forme d’un livre, pour lequel j’ai été nominée pour le « First book Award » à Londres.

Quel était votre projet lors de cette résidence ?

LF : Mon projet était de réaliser un film à bord de Tara, je voulais observer le bateau un peu comme une scène de théâtre, observer les déplacements, la gestuelle, l’activité de chacun à bord du bateau. Tous ces déplacements pouvaient se croiser, avoir lieu en même temps, et cela crée une sorte de chorégraphie.

CS : Je développe un projet qui s’inspire du voyage entrepris par l’astronome français Jules Janssen pour photographier le passage de Vénus devant le soleil en 1874. Pour mon projet, développé en partenariat avec la Société Française de Photographie, je m’intéresse notamment aux procédés anciens développés à l’époque et aux problématiques de mouvements et d’enregistrement d’un tel évènement. J’essaie de faire une sorte de carnet de bord préparatoire, dont une partie sur tara.

Que représente pour vous l’opportunité d’être sur la goélette ?

LF : Je suis née à Marseille, et j’aime la mer. Mon grand-père connaissait le commandant Cousteau, il a notamment participé à la création et à la remise en état de la « Calypso ». J’ai chez moi des ouvrages de sa bibliothèque personnelle consacrée à la navigation. C’est en voyant le film « Les Hommes » d’Ariane Michel que j’ai découvert Tara. J’ai pu visiter le voilier quand il était à Paris, il y a un an et demi. C’est à ce moment-là que l’idée de tourner un film à bord de Tara s’est concrétisée. Un film lié au bateau, au fait d’être en mer, à la navigation, et au mouvement. C’est une opportunité qui est rare.

CS : J’ai toujours été passionnée par ce bateau, qui me fait vraiment penser à un vaisseau, entre le bateau et le sous-marin, un peu comme le Nautilus. C’est un bateau vraiment unique, donc c’était très important pour moi d’être à bord. En tant qu’artiste, Tara me donne de l’inspiration. On peut faire des images partout, en salle des machines ou avec les manipulations scientifiques, je ne pensais pas pouvoir faire autant d’images. Je craignais au départ que cela soit plus monotone, moins riche, mais en fait, c’était très varié.

En quoi est-ce important d’avoir des artistes en résidence sur Tara ?

LF : Je trouve très intéressant que des artistes aient l’opportunité de réaliser un projet à bord du bateau. Qu’ils puissent observer la vie à bord, découvrir la mission scientifique, et porter un regard sur le bateau en lui-même, et que cela puisse donner lieu à des œuvres.

CS : C’est vraiment une très bonne chose de mélanger des artistes et des scientifiques. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, ce sont des gens qui ne sont pas si éloignés que ça, qui essayent chacun à leur manière de comprendre le réel. C’est aussi une chance incroyable pour des artistes, qui ne sont ni scientifiques, ni marins, de pouvoir monter sur un bateau comme Tara, tout simplement. Il n’existe que très peu de résidences d’artistes comme cela, c’est vraiment une chance incroyable.

Propos recueillis par Yann Chavance

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Œuvre de Lorraine Féline : guache

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Carly Steinbrunn : : artiste en résidence sur tara

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